Le pacte d’associés, signé en même temps que le dépôt des statuts de l’entreprise, réserve parfois quelques surprises. Ses fondamentaux sont rappelés dans une première partie. Pour rappel, le pacte d’associés est le document juridique qui organise les relations entre les associés d’une société à responsabilité limitée (SARL). Il a pour synonyme le pacte d’actionnaires qui concerne les membres d’une société anonyme (SA). Les clauses y sont similaires, seule la forme sociale de l’entreprise diffère.
Frenchweb propose une série de points de vue d’experts pour venir l’éclairer. Dans cette seconde partie, Baptiste Robelin, avocat au barreau de Paris, co-fondateur d’Adopte un CTO, Olivier Sanviti, fondateur et Managing Partner, Head of the Venture d’Aston Avocats, et Jérémy Dahan (AssurUp), insistent sur les pièges à éviter.
FrenchWeb: Quelles sont les mauvaises clauses à éviter dans un pacte?
Baptiste Robelin, avocat au barreau de Paris, co-fondateur d’Adopte un CTO: De façon générale, les clauses imprécises sont à proscrire. Toute clause mal rédigée pourrait donner lieu à un contentieux préjudiciable à la société. Il est donc conseillé d’établir une procédure précise pour chaque point abordé par le pacte, limitant les risques de contestations.
Inversement, une clause trop rigide peut donner lieu à des situations de blocages réguliers. La société doit disposer d’une souplesse de fonctionnement pour parer à toutes les situations (changement de majorités, de politiques d’investissements, etc..). Il est donc conseillé de ne pas introduire trop de règles de gouvernance dans le pacte.
Il est également conseillé de prévoir les cas de transmission à titre gratuit (donation ou succession) afin que les ayants droit soient liés au pacte signé par le défunt ou le donateur.
Enfin, si le nombre de signataires est important, la nomination d’un mandataire responsable de la gestion du pacte peut s’imposer, avec pour mission de centraliser les demandes concernant chaque associé et de tenter de les concilier en cas de difficulté.
Peut-on dire qu’il existe des clauses «inacceptables»?
Un certain nombre de clauses sont interdites ou réputées non écrites, elles ne produiront aucun effet. Il en est ainsi des clauses léonines ou purement potestatives (clauses dont l’efficacité dépend de la seule volonté de celui qui s’oblige).
Sont également interdites les clauses ayant pour objet ou pour effet d’interdire aux associés d’agir en justice, ou prévoyant qu’ils devront solliciter l’autorisation préalable des dirigeants pour mettre en cause leur responsabilité.
Dans le cas où elles seraient mal encadrées, certaines clauses comportent également un risque de spoliation des associés. Il en est ainsi des clauses d’exclusion.
Ainsi, si une clause prévoit l’exclusion d’un associé pour faute ou comportement contraire àl’intérêt social, qui sera juge d’un tel comportement? Les majoritaires? Les dirigeants? Afin de prévenir les abus, il est conseillé de confier l’appréciation d’une éventuelle faute de l’associé à un tiers indépendant (juge ou arbitre).
Et dans cette hypothèse, quel sera le sort des titres de l’associé exclu? Certains pactes prévoient que l’associé devra céder automatiquement ses titres et qu’en cas de refus, la société pourra ordonner le transfert.
Pour se défendre, l’associé n’aura d’autre choix que de demander au tribunal la désignation d’un séquestre de ses actions, préservant ses intérêts. C’est le risque d’une clause trop sévère: dégénérer en contentieux dans un contexte où on avait en l’occurrence voulu l’éviter.
Sur un plan général, il est conseillé d’éviter toutes les clauses introduisant un déséquilibre significatif entre les parties. Il faut garder à l’esprit que le pacte est un instrument destiné à éviter les conflits en conciliant les intérêts divergents des actionnaires entre eux et ceux de la société.
Olivier Sanviti fondateur et Managing Partner, Head of the Venture d’Aston Avocats et avocat aux Barreaux de Paris et Madrid:
Il est difficile de répondre à cette question, cela dépend de la typologie du deal. Certaines clauses peuvent être inacceptables dans un dossier en particulier alors qu’elles peuvent être acceptées dans d’autres. La clause qui est toujours difficile à négocier est celle de bad leaver, elle est parfois vécu comme une épée de Damocles par les dirigeants.
Les autres clauses les plus délicates à négocier sont les suivantes :
La clause d’inaliénabilité («lock-up») interdit aux fondateurs de céder leurs actions pendant plusieurs années. Toute la difficulté est, lors des négociations, d’intégrer une clause de respiration. Celle-ci permettra à un fondateur de céder un petit pourcentage de ses titres et ainsi par exemple, pouvoir financer l’achat d’un appartement.
La clause de bad leaver est la clause la plus emblématique. Elle a pour objet d’organiser le rachat des titres détenus par le fondateur, selon un prix de rachat déterminé à l’avance et très fortement décoté, lorsqu’il cesse ses fonctions dans des circonstances fautives. La négociation est parfois très dure, les fondateurs considérant qu’ils ont crée de la valeur avant l’entrée de l’investisseur et que dans l’hypothèse d’une faute commise, leurs titres devraient tout de même être rachetés à une valeur très supérieure à leur valeur nominale. A l’autre extrémité, les VC considéreront que la faute commise par le fondateur doit entrainer un rachat de ses titres à une valeur très faible. Il sera important à ce moment précis de bien définir le type de fautes commises.
Il est également recommander de négocier une clause de good leaver dans l’hypothèse d’un départ autorisé, par exemple pour cause de maladie.
La clause de liquidation préférentielle («preferred shares») permet d’assurer à l’investisseur une valorisation majorée de sa participation, tandis que celle des fondateurs sera réduite. Si cette clause est intégrer par le fonds d’investissement, il est très important de se faire accompagner par un avocat afin de la négocier au mieux, les pièges étant nombreux et les effets de seuils, parfois important.
Au-delà des mauvaises clauses, les associés du pacte doivent aussi connaître des clauses d’assurances peu connues des entrepreneurs et qu’il faut connaître.
Jeremy Dahan, chargé de clientèle chez Assur’Up, un courtier d’assurances spécialiste des jeunes entreprises innovantes:
Pour éviter les mauvaises surprises, l’assurance «malveillance informatique» est recommandée: Depuis peu, certains investisseurs imposent cette assurance aux start-up ayant un site Internet ou une application mobile afin de
Nous retrouvons des obligations d’assurances très différentes selon le type d’actionnariat et le montant de la levée (parfois aucune obligation pour des levées inférieures à 500 000 euros).
En résumé, si je devais investir dans une start-up et ce quelque soit le montant, j’imposerai ces différents points de couvertures pour protéger mon investissement ainsi que les dirigeants.